9.8.11

Article de Sylvie Botton


Mylène Lormier, La remise en circulation de l’émotion 
Mylène Lormier accouche le comédien qui sommeille en vous. Vingt années de pratique ont aiguisé son sens du diagnostic et sa palette d’intervention. Elle observe que beaucoup souffrent d’une scission entre ce qu’ils pensent, ressentent et expriment.Bienveillante avec chacun, elle souligne le positif et tait ce qui ne va pas pour mieux y remédier.Elle adaptera mille exercices selon vos besoins du moment : déverrouiller votre expressivité est son métier. Elle résume souvent son travail par « une remise en circulation de l’émotion, de la pensée et du mouvement ».
Dans la mise en scène des textes, pour que le personnage soit incarné et vivant, il faut que la pensée provoque chez l’acteur un ressenti qui lui donne envie de s’engager physiquement dans l’action. Exemple :Dans la mise en scène des textes, pour que le personnage soit incarné et vivant, il faut que la pensée provoque chez l’acteur un ressenti qui lui donne envie de s’engager physiquement dans l’action. Exemple : « C’est parce que je comprends qu’il ne m’aime plus que monte l’envie de pleurer qui me fait courir à la porte pour le retenir. »La différence entre le clown et l’héroïne racinienne sera dans l’amplitude du jeu : l’Auguste hurle sur quatre tours de piste et brûle le rideau ; Hermione ravale ses larmes et détourne la tête… Mais c’est à chaque fois le même type de circulation entre pensée, émotion et mouvements corporels.

Gagner en maturité, profondeur et amplitude 
Mylène Lormier avoue que cette décrispation des blocages la passionne : assister à la naissance d’un talent, ici et maintenant, fortifier une compétence expressive qui prend conscience d’elle-même et devient capable de performance programmée est hyper valorisant pour elle comme pour le comédien. Qu’il s’agisse d’un professionnel en rodage ou bien d’une DRH voulant dire un compliment au mariage de sa fille, l’enjeu est le même, si l’engagement est sérieux.Dans sa méthode de travail, la conscience de la justesse du jeu et du plaisir qu’il occasionne est capitale. Sur les traces de théoriciens comme Stanislavski ou Declan Donnellan, elle dirige une compréhension approfondie des textes.Savoir lire, percevoir les manques et les besoins, comprendre les contraintes et les obstacles qui norment chaque personnage : tel est l’apport de la « matière grise », jamais séparée du ressenti.
Mylène Lormier résume : « Quand le comédien se sent libre sur un plateau et que l’analyse de la situation est juste, alors le jeu vient tout seul […] Si tête-cœur-et-corps sont en cohérence et à l’écoute des partenaires le rodage va très vite… c’est la clé ! Tout est là.»

Extraits d’un entretien réalisé à Paris, le 21 juin 2011,par S. Leliepvre Botton agrégée de philosophie créatrice du site philophil.x